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La peur et le retournement


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Les Mayons

!!La peur et le retour­ne­ment – 27 – 28/12/15



Avec : Andréine, Ber­nard, Cen­dri­na, Her­vé.

Lieu : la petite pièce de pra­tique de la mai­son.

CR écrit par Andréine sans notes prises sur le moment. Puis lu et cor­ri­gé par Ber­nard, puis Cen­dri­na et Her­vé. Ce qui est entre [ ] a été écrit à la rédac­tion, et ne s’est pas dit pen­dant la DF.

27 décembre après-midi :

L’éveil des muscles, puis la pra­tique d’Hervé : exer­cices expé­ri­men­taux issus des ate­liers “corps en émo­tion” : www​.corp​se​ne​mo​tion​.org, puis l’éveil des sen­sa­tions et une impro danse à par­tir de cet éveil.

Thème réflexif choi­si : la peur.

28 décembre matin :

Éveil des muscles et mou­ve­ment régé­né­ra­teur.

L’éveil des muscles fai­sant appel au spon­ta­né se confirme comme étant une excel­lente pré­pa­ra­tion au mou­ve­ment régé­né­ra­teur. En répon­dant aux besoins indi­qués par les muscles puis les chaînes mus­cu­laires, le corps entier se dyna­mise selon son propre che­mi­ne­ment.

Fin de mati­née :

1’^ère^’ pro­po­si­tion d’Hervé, retrans­crite par lui-même :

Par­tir d’une sen­sa­tion de ten­sion qui est reliée à une émo­tion ou pas. La mettre en mou­ve­ment par l’ima­gi­na­tion, en consi­dé­rant cette ten­sion comme le moteur du mou­ve­ment, qui est au départ un micro-mou­ve­ment au sein de cette ten­sion, puis len­te­ment ampli­fier ce mou­ve­ment en le lais­sant gagner les tis­sus mus­cu­laires et ner­veux telles des ondes pro­vo­quées par le jet d’un caillou à la sur­face d’un lac. Une fois cette zone mise en mou­ve­ment, débu­ter un dépla­ce­ment dans l’espace en res­tant vigi­lant de la manière dont celui-ci modi­fie (même légè­re­ment) la façon de se mou­voir.

Après un cer­tain temps (variable selon les per­sonnes) suf­fi­sant pour s’habituer à cette nou­velle façon de se dépla­cer, pro­po­si­tion d’ampli­fier ces mou­ve­ments autant qu’on le peut, soit en pro­po­sant des mou­ve­ments ins­pi­rés de verbes expri­mant une action de dépla­ce­ment – comme rejoindre, rega­gner, aller vers, atteindre, retrou­ver – soit en ali­men­tant l’imaginaire par l’emploi de conseils tels que : essayez de tou­cher avec votre corps l’autre côté de la pièce, ou ima­gi­nez que ces mou­ve­ments s’étirent jusqu’à ce que vous ayez l’impression de deve­nir des géants, ou encore que vous ayez la capa­ci­té de tou­cher les nuages etc.

En sui­vant ces consignes, notre corps, par sa mise en mou­ve­ment, est à même de trans­for­mer cette sen­sa­tion de ten­sion (reliée à une émo­tion ou pas) en repre­nant le pou­voir en agis­sant sur elle afin de ne plus être domi­née par celle-ci. C’est pour­quoi ce pro­ces­sus de trans­for­ma­tion peut s’apparenter à une fête, au sens où nous fêtons par notre corps en mou­ve­ment une sen­sa­tion de ten­sion, et/ou une émo­tion qui au départ avait entra­vé notre pou­voir d’action.

2’^e^’ pro­po­si­tion d’Hervé :

Com­ment trans­mettre une courte série de mou­ve­ments (éla­bo­rée d’après notre ten­sion, cf exer­cice pré­cé­dent) à un par­te­naire, qui lui-même après l’avoir inté­gré cor­po­rel­le­ment, va le modi­fier à par­tir de sa propre sen­sa­tion de ten­sion, avant de le com­mu­ni­quer à un autre par­te­naire et ain­si de suite.

Après-midi :

Éveil des sen­sa­tions : apprendre à dif­fé­ren­cier les sen­sa­tions externes des internes, les sen­sa­tions de cir­cons­tance (comme avoir trop man­gé juste avant la DF) de celles plus de base. Pul­sa­tions, ten­sions… amènent le corps à se mobi­li­ser selon ses besoins, les sen­sa­tions évo­luent ou se déplacent. Elles se « nor­ma­lisent » spon­ta­né­ment au fur et à mesure que l’on répond aux besoins qu’elles signalent.

Impro­vi­sa­tion dan­sée en silence et dans tout l’espace de la pièce, pour se pré­pa­rer à la danse : sor­tir de la bulle indi­vi­duelle en éten­dant nos sens à l’espace qui nous entoure, au temps qui s’écoule et à l’ « éner­gie » des autres.

Thème sen­si­tif ayant émer­gé de l’éveil des sen­sa­tions et de cette impro : le ren­ver­se­ment.

[Cer­tains d’entre nous ont pu ima­gi­ner (et dire ?) un lien entre « peur » et « ren­ver­se­ment » comme par exemple des peurs peuvent nous secouer au point de nous ren­ver­ser au sens figu­ré. Nous décou­vri­rons en fait un lien inat­ten­du entre « peur » et « ren­ver­se­ment » au fur et à mesure de la DF.]

Construc­tion et pré­sen­ta­tion de l’espace scé­nique et de la bor­dure avec des tapis, le reste de la pièce étant réser­vée aux spec­ta­teurs (ici, ceux des dan­seurs qui ne sont pas sur scène) et au til­teur.

Pré­ci­sions appor­tées avant la DF

- Le til­teur clape une fois pour arrê­ter la danse et per­mettre le retour ver­bal, et une fois pour que la danse redé­marre (immo­bile ou en mou­ve­ment). La musique mise par le til­teur ne décide en rien du début ni de la fin de la danse.

- Celui qui inter­vient depuis la bor­dure peut cla­per pour sus­pendre la danse, et il refait un clap pour qu’elle reprenne. Il peut aus­si choi­sir d’intervenir conjoin­te­ment à la danse.

- En tant que til­teur, j’ai choi­si de ne pas entrer sur scène ni sur la bor­dure, même si c’est une DF de tra­vail, pour se mettre dans des condi­tions de repré­sen­ta­tion publique.

- Le til­teur est aus­si spec­ta­teur, il peut par­ti­ci­per au retour oral si néces­saire.

Pour pou­voir pro­blé­ma­ti­ser, à chaque retour et en tant que til­teur, j’ai posé deux ques­tions aux spec­ta­teurs ou et/ou aux dan­seurs :

1 – « Qu’est-ce qu’ils ont vu (les spec­ta­teurs) ou vécu (les dan­seurs) ? »

2 – « Quelle ques­tion cela pose ? »

Ces deux ques­tions du til­teur se com­plètent, la pre­mière ame­nant au forum un constat qui éva­lue sans juger (se conten­ter de décrire évite de s’engouffrer dans le juge­ment), la seconde per­met­tant d’évo­luer par rap­port à ce constat (grâce à la dyna­mique insuf­flée par la ques­tion, sans pré­sup­po­ser de la réponse), lors de l’improvisation sui­vante.

1’^ère^’ impro (elle a été très courte), puis retour :

- obser­va­tion et constat : les dan­seurs paraissent et se sentent com­pri­més. L’espace est « trop petit » pour eux.

- mise en ques­tion : com­ment gérer la dis­tance entre les dan­seurs ? Com­ment ne pas avoir peur de l’autre, d’envahir son espace ? Com­ment ne pas faire n’importe quoi et res­pec­ter les autres ?

2’^e^’ impro puis retour :

- obser­va­tion et constat : curieu­se­ment, dans cet espace trop petit, cer­tains dan­seurs se sentent iso­lés.

- mise en ques­tion : com­ment ne pas se sen­tir iso­lé alors qu’on est dans un petit espace ?

3’^e^’ impro puis retour :

- obser­va­tion et constat : l’intimité entre deux dan­seurs rend les spec­ta­teurs « voyeurs », ils ne savent plus où est leur place.

- mise en ques­tion : com­ment être dans un petit espace et com­mu­ni­quer sans créer une rela­tion arti­fi­cielle sur scène, qui trouble le spec­ta­teur ?

4’^e^’ impro puis retour :

- obser­va­tion et constat : l’espace a sem­blé s’agrandir et se struc­tu­rer. Les direc­tions des dépla­ce­ments et l’orientation des gestes de cha­cun par rap­port à ceux des autres se sont mises en place. [Le groupe est deve­nu comme un être vivant.]

Un qua­train a été réci­té par Her­vé sur la bor­dure scé­nique.

« Je vou­drais pas cre­ver et j’veux pas qu’on me dise

Com­bien de kilo­mètres à pied, il me reste à mar­cher

Je veux pas qu’on s’épuise à tout m’expliquer,

Lais­sez-moi des sur­prises, lais­sez-moi rêver… »

(extrait de la chan­son « Mou­rir d’un oeil » issue de l’album Car­min de Daph­né, écrite par elle-même)

Il y a eu un ren­ver­se­ment du regard du dan­seur sur ce qu’il fait (ne pas faire n’importe quoi), et du rap­port de cha­cun au groupe. Pour les uns la peur est par­tie, pour les autres elle s’est trans­for­mée.

- mise en ques­tion : qu’est-ce que l’intimité ?

- Obser­va­tion et constat : la com­mu­ni­ca­tion est deve­nue pos­sible entre les dan­seurs alors même qu’ils ne se sont pas tou­chés, c’est peut-être cela la véri­table inti­mi­té.

Bilan

Grâce au par­tage des retours ver­baux, on a intro­duit une réflexi­vi­té dans l’action : à la fois on agit et on prend une dis­tance par rap­port à ce que l’on fait, tout en se ren­dant conscient de ce que font les autres. On est entré en contact avec les autres par cet acte de réflexi­vi­té plus que par l’affectivité.

Nous n’avions aucune idée de où et com­ment les deux thèmes allaient jouer leur rôle. [Ils ont émer­gé des impro­vi­sa­tions comme une algue qui se serait déta­chée du fond de mer.] C’est le thème de la peur qui nous a ame­nés au retour­ne­ment du regard.

Réflexions du til­teur

Après deux ans et demi sans faire de danse forum, je me rends compte que les pro­blé­ma­tiques de cet outil de réflexion ont conti­nué à me tra­vailler tout ce temps. Cer­tains points se sont éclair­cis.

– Une fois de plus, j’ai eu la sen­sa­tion que c’est seule­ment à par­tir du moment où l’espace est struc­tu­ré pour la danse forum que la musique peut être accueillie par tous les dan­seurs. De la bulle de silence for­mée pen­dant l’éveil des sen­sa­tions, les dan­seurs ouvrent leurs sens vers l’extérieur pen­dant l’improvisation libre : leurs yeux, oreilles et pieds découvrent l’extérieur de soi. Le silence rend enve­lop­pants à la fois l’espace déli­mi­té par la pièce où l’on se trouve, et le temps impar­ti pour cette pra­tique. Enfin la danse arrive avec ou sans musique, grâce à un temps, un espace et une éner­gie struc­tu­rés.

– J’ai obser­vé ce qui m’a fait cla­per pour deman­der rapi­de­ment un retour ver­bal lors de la pre­mière impro, comme cela m’arrive par­fois. De ma place de til­teur, je per­çois que la danse est du « n’importe quoi » au sens où les dan­seurs ne semblent pas savoir ce qu’ils font sur scène (eux peuvent savoir tout à fait ce qu’ils font, avoir une autre impres­sion que moi). En fait, pour moi, la danse n’a pas encore com­men­cé, les mou­ve­ments m’apparaissent comme de la ges­ti­cu­la­tion pour rem­plir le vide. Une fois que la danse com­mence, ce qui me fait cla­per, c’est la dyna­mique géné­rale, comme de mettre une vir­gule ou un point vir­gule dans une phrase pour reprendre son souffle, ou un nou­vel élan. Dès que la « poé­sie du geste » m’apparaît, comme ici lors de la der­nière impro, pas besoin de ponc­tua­tion et l’impro se ter­mine d’elle-même. Je dirais que, d’une manière géné­rale, lorsque cla­per per­met à cha­cun de se res­sai­sir, recen­trer, et de pro­blé­ma­ti­ser ce qui se passe, je sais que j’ai cla­pé au bon moment.

– Je me suis enten­due arti­cu­ler les deux ques­tions lors du pre­mier retour sans les avoir pré­pa­rées, mais je vou­lais trou­ver l’inter­ven­tion mini­male qui per­met un forum en danse.

Pour la pre­mière ques­tion : « Qu’est-ce qui a été vu ou vécu ? » Il s’agit de décrire ce que l’on a obser­vé sans inter­pré­ter ni pro­po­ser quoi que ce soit (à la dif­fé­rence du TF). Se limi­ter à décrire (ce que l’on a vu ou vécu) per­met de ne pas s’engouffrer dans le juge­ment.

Pour la deuxième ques­tion : « Quelle ques­tion cela pose ? », la mise en ques­tion de ce qui a été obser­vé est motrice d’évolution, spon­ta­né­ment. Cela évite d’avoir à poser la ques­tion sui­vante : « – Quelle solu­tion pro­po­se­riez-vous ? », qui peut apla­tir la dyna­mique de la pro­blé­ma­ti­sa­tion ou ame­ner des solu­tions sté­réo­ty­pées, l’habitude s’installant.

La répé­ti­tion de ces ques­tions à chaque retour deman­dé par le til­teur m’est appa­rue récon­for­tante pour tout le monde, struc­tu­rante : il y avait au moins quelque chose qui se répé­tait.

– Lorsque nous avons com­men­cé la pre­mière impro, c’était à l’aveuglette car il n’est pas facile pour des nou­veaux de dan­ser dans l’immanence des sen­sa­tions. Les deux thèmes n’étaient d’aucun secours puisque nous les lais­sons dans l’arrière plan nous tra­vailler incons­ciem­ment.

Ain­si, dès le pre­mier retour, nous en sommes venus à pro­blé­ma­ti­ser la danse elle-même, le rap­port du dan­seur à l’espace, à lui-même et aux autres.

Bien sûr, pro­blé­ma­ti­ser la danse c’est pro­blé­ma­ti­ser la vie, sur son plan social, éthique, phi­lo­so­phique, poli­tique etc.
Mais nous devrions être capables de pro­blé­ma­ti­ser des situa­tions variées sans prendre la danse comme base de réflexion, comme cela nous arrive le plus sou­vent.

Au cours des sept années d’élaboration de la DF, nous avons à peu près tout essayé pour cela. Par exemple, déci­der d’une mise en scène mini­male au départ et qui s’élabore peu à peu : « Nou­nours dans sa bulle » http://​wiki​.leti​.lt/​D​a​n​s​e​F​o​r​u​m​/​N​o​u​n​o​u​r​s​D​a​n​s​S​a​B​u​lle
Ou alors, par­tir d’un tableau ame­né sur place par une des dan­seuses http://​wiki​.leti​.lt/​D​a​n​s​e​F​o​r​u​m​/​P​e​i​n​t​ure

Ou alors par­tir de musique vivante, d’extrait de pièce de théâtre etc.

Tout cela ne nous a jamais com­plè­te­ment convain­cu, la pro­po­si­tion de mise en scène intro­dui­sant un élé­ment ana­chro­nique et somme toute arti­fi­ciel qui pre­nait presque toute notre éner­gie pour que nous puis­sions nous l’approprier. La DF du 4/2/06 sur la peur en est un exemple frap­pant http://​wiki​.leti​.lt/​D​a​n​s​e​F​o​r​u​m​/​L​a​P​eur

Mal­gré cela, dans ces essais, presque chaque fois la sauce pre­nait à un moment don­né, sans que nous sachions vrai­ment pour­quoi. Même si la faci­li­té n’était pas au rdv, l’enthousiasme venait au cré­neau.

Je garde tou­jours en mémoire par­ti­cu­liè­re­ment deux DF :

* Celle qui tour­nait autour du poids don­né et reçu, ayant pour thème la pres­sion :

http://​wiki​.leti​.lt/​D​a​n​s​e​F​o​r​u​m​/​L​a​P​r​e​s​s​ion


* Et la sui­vante, qui par­tait du poids pour aller vers l’autonomie : http://​wiki​.leti​.lt/​D​a​n​s​e​F​o​r​u​m​/​L​a​S​e​p​a​r​a​t​ion

Dans ces deux DF, nous nous appro­chions d’une mise en scène mais sans trop y lais­ser de plumes. Je pense que c’est parce qu’elles étaient en fait des « mises en situa­tion » déci­dées par l’ensemble des par­ti­ci­pants. Une mise en situa­tion est en quelque sorte un début de mise en scène sans que l’on sache à l’avance com­ment elle va se dérou­ler.

Dans notre danse forum du 28/12/15, la mise en situa­tion est venue d’elle-même, par une consta­ta­tion : l’espace entre les dan­seurs pose pro­blème. En pro­blé­ma­ti­sant cette consta­ta­tion, l’espace est deve­nu vivant comme nos rela­tions. Ce qui a été éton­nant, c’est que le retour­ne­ment s’est exer­cé au niveau du regard et qu’il a fait s’évanouir la peur ou au moins l’a trans­for­mée en per­met­tant une com­mu­ni­ca­tion entre les dan­seurs, nous n’aurions jamais ima­gi­né ce scé­na­rio.

En rédi­geant ce CR, je me suis deman­dée com­ment nous aurions pu mettre en situa­tion la peur et le ren­ver­se­ment. Nous aurions pu pro­po­ser qu’un seul des dan­seurs garde les yeux fer­més pen­dant que les autres les gardent ouverts. Puis qu’un seul des dan­seurs garde les yeux ouverts. Et voir com­ment les mou­ve­ments et les corps s’agencent, quelle rela­tion ils entre­tiennent avec la peur de contact ou de heurts, et avec un ren­ver­se­ment de situa­tion. Nous aurions pu aus­si pro­po­ser qu’un seul des dan­seurs reste immo­bile, puis qu’un seul bouge. Avec ces mises en situa­tion, le résul­tat aurait été très dif­fé­rent de ce que nous avons obte­nu, car le point de départ aurait été autre que la danse. Aurait-il été plus inté­res­sant ?

En tous cas, il aurait ouvert d’autres champs d’investigation. Il me semble éga­le­ment que c’est un outil à rete­nir pour ne pas démar­rer la pre­mière impro à l’aveuglette lorsqu’il y a des nou­veaux.

Andréine Bel

Article créé le 16/02/2020

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